Novadene Miller, professionnelle de l’éducation du Programme d’éducation intermédiaire (PEI), présente deux remarquables projets de service en tant qu’action et le rôle essentiel qu’ils jouent dans un monde en constante évolution.
Par Novadene Miller
Nous vivons à l’ère de la mondialisation, où les paradigmes du développement durable et les cadres éthiques sont redéfinis chaque jour. En tant qu’enseignants, nous devons réfléchir à la manière d’intégrer les identités personnelles dans les projets d’action tout en considérant les enjeux, les défis et les opinions divergentes qui caractérisent notre époque. L’action est un besoin fondamental qui offre une bouffée d’air frais en cette période de changements perpétuels.
Étant moi-même enseignante de la composante service en tant qu’action, il me semble essentiel de comprendre le rôle que nous jouons dans l’élaboration des projets de nos élèves et le legs que cela représente pour la prochaine génération.
Un élève m’a d’ailleurs dit récemment que mener ce type de projets était enrichissant. Le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui redéfinit sans cesse la notion de service. La crise sanitaire liée au COVID-19 a mis en évidence l’urgence de combler les lacunes du paradigme de l’éducation actuel et de mettre en œuvre des mesures de protection, notamment pour la santé physique et mentale des élèves, et d’augmenter leur capacité à atteindre des communautés plus larges.
Cette année, les enseignants ont dû faire face à de nombreux défis pour communiquer avec leurs élèves tout en respectant les règles de distanciation sociale et en assurant leur sécurité sans brider leur créativité.
Redéfinir nos méthodes de communication et adapter les ateliers
Pendant la pandémie de COVID-19, un groupe d’élèves de 4e et 5e année du PEI a choisi de réaliser un projet sur l’égalité des sexes. Leur message, qui s’appuyait sur des techniques d’apprentissage horizontales et verticales, s’adressait principalement à des élèves d’établissements primaires.
Ils ont voulu transmettre un message important de manière amusante et compréhensible. Au lieu de faire une présentation traditionnelle, ils ont cherché des représentations artistiques de l’égalité des sexes. Ils ont ensuite présenté ces images aux élèves et, à l’aide de techniques de recherche structurée guidant la pensée, ils les ont amenés à poser des questions. Ils ont aussi recherché des articles et des titres récents de magazines ou de journaux, et les ont découpés. Enfin, ils ont animé un atelier au cours duquel les élèves ont réfléchi à leur propre représentation de l’égalité des sexes. Ils ont ensuite mis en image, à l’aide des coupures mises à leur disposition, leur propre interprétation du message qu’ils avaient reçu.
Les élèves de 4e et 5e années du PEI y ont ensuite ajouté de la peinture, des paillettes et d’autres éléments de décoration pour leur donner une touche finale. Ces différents niveaux de réflexion et d’interprétation ont donné lieu à un ensemble d’images éclectique et ont permis aux élèves de montrer leurs compétences de pensée et de communication. À la fin du projet, j’ai demandé à mes élèves de partager leurs points de vue sur le processus. Ils m’ont dit avoir aimé voir comment les élèves avaient interprété leurs idées et qu’ils avaient ressenti de la fierté en les voyant s’impliquer autant dans le projet. Ils ont réussi à créer un sentiment d’appartenance à une communauté tout en faisant passer un message fort et en développant leurs compétences de direction.
Renforcer le sentiment d’appartenance à une communauté pour les élèves ayant des besoins en matière d’inclusion
En raison de la pandémie de COVID-19, nous avons dû adapter nos méthodes de collecte de fonds. Nous devions éviter les rassemblements et optimiser notre capacité à collecter des fonds pour pouvoir soutenir des projets qui toucheraient l’ensemble de la communauté et auraient un impact durable.
Les élèves de 2e année du PEI ont créé un projet sur l’éducation des élèves ayant des besoins en matière d’inclusion. Ils ont rencontré plusieurs difficultés liées au contexte, notamment parce que les familles participent de moins en moins aux activités quotidiennes de leurs communautés.
Le 2 avril, ils ont décidé de célébrer la Journée mondiale de la sensibilisation à l’autisme. Ils ont commandé des badges emballés individuellement pour sensibiliser le public. Ils ont conçu les badges eux-mêmes en créant le modèle et en y ajoutant la date, le thème de la journée, le symbole de l’autisme et le logo de l’établissement. Ils ont su mobiliser leurs compétences de communication et de pensée tout au long du projet et ont installé un beau stand dans la cour de l’établissement pour vendre les badges. En moins d’une heure, tout était vendu. L’argent récolté sera reversé à une association caritative engagée dans cette cause.
J’ai également lancé une collaboration avec un établissement de Jamaïque, qui se trouve être mon pays d’origine. Ma devise est : « Vous pouvez changer le monde ». Elle permet aux élèves de comprendre que leurs idées peuvent modifier les comportements et les habitudes à l’échelle de la planète. Ils ont répondu à cette invitation avec enthousiasme et conviction, dépassant même mes attentes. Ils ont demandé à leurs parents de réaliser une vidéo dans laquelle ils se présentaient, définissaient leur objectif pour le 2 avril, expliquaient en quoi consiste la Journée mondiale de la sensibilisation à l’autisme et proposaient à l’établissement de relever un défi en lien avec les activités qu’ils avaient suggérées dans le cadre de cette journée. Cette vidéo a ensuite été envoyée en Jamaïque pour que l’enseignante sensibilise ses élèves à cette cause.
Le fait de voir mes élèves réagir au transfert de leurs idées dans un autre pays m’a rappelé que nous formons des esprits et que nous pouvons transformer les communautés internationales et ériger des ponts entre les pays.
Les élèves et les enseignants de notre établissement ont été invités à porter du bleu, la couleur qui a été choisie à l’échelle internationale pour cette journée. L’établissement s’est transformé en un océan de bleus et les élèves de 2e année du PEI sont allés dans les classes pour demander à leurs pairs d’écrire un texte sur la Journée mondiale de la sensibilisation à l’autisme dans leur langue maternelle. Un dialogue a alors été engagé, suscitant des questions sur l’autisme et nous espérons que cela permettra de faire évoluer le regard vis-à-vis des élèves ayant des besoins en matière d’inclusion.
Renforcer l’apprentissage interdisciplinaire au moyen de projets
L’apprentissage interdisciplinaire est un élément fondamental du PEI. Les projets de service en tant qu’action donnent la possibilité d’exprimer et d’illustrer les principes appris dans le cadre des plans de travail des unités. Comme le souligne l’article publié en mars dernier, j’enseigne aussi les matières du groupe Individus et sociétés à tous les niveaux du PEI.
Cette unité interdisciplinaire s’intitulait « Compétences cognitives, sciences humaines et comportement ». Le concept clé était le « changement » et les concepts connexes étaient les « conséquences » et l’« esprit ». La qualité du profil de l’apprenant de l’IB affichée était la suivante : « équilibré ». La matière a permis aux élèves de faire le lien avec la mondialisation et d’établir une corrélation avec des variables en sciences. Par exemple, ils ont réalisé une carte de l’empathie pour étudier le lien entre le système nerveux (sciences), les sens associés au système nerveux, leurs activités quotidiennes en tant qu’élèves, notamment celles liées à la mondialisation telles que celles effectuées sur Internet, qui est un environnement international et, par extension, leur bien-être. Les élèves ont ensuite été guidés pour se mettre à la place d’un ou d’une amie pour le ou laquelle ils se faisaient du souci.
Cette activité a permis d’engager un dialogue sur les difficultés que peuvent rencontrer leurs amis, telles que la cyberintimidation, le stress et la pression des amis, les attentes des parents et des enseignants, les problèmes liés au fait d’être dans une école internationale, un environnement parfois différent de celui qu’ils connaissent, ou le sentiment d’isolement, pour n’en citer que quelques-uns. En utilisant les techniques d’apprentissage des ateliers animés par des pairs dans des petits groupes d’élèves, ils ont trouvé des solutions pour agir auprès de leurs amis au sein de la communauté.
J’espère que cet article vous donnera des idées de projets de service en tant qu’action pour former la prochaine génération de décideurs.
Novadene Miller enseigne les matières des groupes Individus et sociétés, Design et service en tant qu’action du Programme d’éducation intermédiaire (PEI) à l’École Privée Bilingue Internationale, à Baillargues, près de Montpellier, en France. Cet établissement propose le Programme du diplôme et, désormais, le PEI. Elle est titulaire d’un doctorat en géographie et est l’auteure de plusieurs articles, dont Atteindre la durabilité des ressources naturelles et les objectifs économiques. La boîte à pandore du tourisme publié dans la revue Études caribéennes, et d’un chapitre de l’ouvrage Rainforest Tourism, Conservation and Management – Challenges for Sustainable Development, publié en 2014 par Bruce Prideaux (chez Routledge, collection Earthscan). Elle a également publié un article sur l’enseignement des matières du groupe Individus et sociétés du PEI dans un monde en pleine évolution.